Retour sur la journée des précarités alimentaires en Île-de-France
- clotildesaurine
- il y a 2 jours
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Le 12 novembre dernier à la Bourse départementale du Travail de Bobigny se tenait une journée réseau régionale afin de faire le point ensemble sur les précarités alimentaires en Ile-de-France. Cette journée était co-organisée par Action contre la Faim, l’Agence Nouvelle des Solidarités Actives (ANSA), le CNFPT et le Conseil départemental de Seine-Saint-Denis avec le soutien financier de l’Agence Régionale de Santé Ile-de-France, le Programme National pour l’Alimentation et le Conseil Régional Ile-de-France. Au nom du réseau AUPA que la Chaire anime, nous vous proposons un point sur cette journée riche en retours d'expérience mais aussi en éléments de plaidoyer pour faire que l'alimentation soit reconnue comme un droit fondamental.

Des mots de bienvenue qui donnent le ton
Dès l’ouverture, le Conseil départemental de Seine-Saint-Denis (CD93) a rappelé une évidence trop souvent oubliée : bien manger n’est pas un privilège, mais un droit.
Le CD93 a notamment partagé l’expérience Vit'alim, menée par Action contre la Faim, qui montre comment l’accès à une alimentation de qualité permet de retrouver dignité sociale et bien-être.
Le Conseil Régional Ile-de-France a quant à lui rappelé un constat alarmant, à savoir que les seuils de pauvreté dans le département frôlent les niveaux du Covid voire les dépasse. Et la nécessité de lutter contre la malbouffe qui devient elle aussi chère.
La région travaille au développement des circuits courts, notamment via l’approvisionnement des cantines de lycées (programme Aprov'Halles) ; à l'accessibilité via des repas à 50 centimes pour les lycéens remplissant les critères sociaux, etc.
Pour l’ARS, la précarité alimentaire est un sujet complexe car elle entraîne des maladies chroniques (comme le diabète) et des situations invisibles, notamment chez les femmes vivant à l’hôtel social, souvent en anémie parce qu’elles privilégient leurs enfants.
Trois priorités ont été mises en avant : le fait de mobiliser davantage les professionnels de santé pour qu’ils repèrent les situations de précarité alimentaire, d'identifier précisément les conséquences sanitaires réelles, et de renforcer l’intersectorialité, afin que santé, social, éducation et territoires travaillent ensemble.
Avec une attention toute particulière portée vers la recherche : comment la science peut-elle nourrir la réponse publique ?
Une introduction au travers de regards sociologiques et structurels
Damien Conaré, secrétaire général de la Chaire Unesco Alimentations du Monde, a replacé le sujet dans son contexte global :
16% des agriculteurs vivent sous le seuil de pauvreté;
9 millions de Français sont concernés (50% ont moins de 30 ans)
18% des étudiants ont recours à l’aide alimentaire.
Les 15–30 ans forment une génération marquée par une précarité commune, décrite comme une “marée montante”.
Deux références importantes ont été citées :
Les travaux d’ATD Quart Monde avec Oxford sur les dimensions cachées de la pauvreté.
Les analyses de Pierre Rosanvallon, qui part du vécu des personnes, comme avec les Gilets jaunes, pour comprendre nos structures sociales.
Autre débat récurrent : Faut-il repenser, voire dépasser, le modèle actuel de l’aide alimentaire ? L’État doit-il reprendre la main sur cette mission fondamentale, aujourd’hui largement portée par un tissu associatif extrêmement mobilisé ?
C'est via plusieurs pistes d'évolution que cette intervention s'est achevée citant : les politiques publiques (CoCoLuPa, MMPT, CoopAlim en Occitanie), les dynamiques de solidarité territoriale via les PAT (Projets Alimentaires Territoriaux), la participation des personnes concernées : prendre part, pas seulement recevoir et enfin le renforcement du pouvoir d’agir des personnes.
Une première table ronde : "Formations et interconnaissance sur les précarités alimentaires en IDF"

Autour des interventions de Raphaëlle Ancelin (DGCS), Sarah Niamor (CNFPT), Laurence Perrin (ARD IDF) et Hélène Preux (DRIAAF), la table ronde a montré une aggravation forte de la précarité alimentaire en Île-de-France, avec plus de besoins mais moins de dons et des financements incertains. Les acteurs publics (État, Région, ARS, collectivités) mettent en avant la nécessité de mieux coordonner leurs actions, de renforcer les formations et de développer une culture commune autour de la justice alimentaire. Les échanges ont aussi rappelé que certaines politiques — liées au logement, à l’asile, ou aux filières agricoles — créent elles-mêmes de la précarité, compliquant les réponses. Enfin, tous se sont accordés sur la nécessité d’une approche systémique et durable, intégrant agriculture, santé, social et participation des personnes concernées.
Une deuxième session autour de la formation Alim'Activ
Après une restitution de l'évaluation de la formation menée par l'ANSA, la table ronde a réuni plusieurs territoires qui ont témoigné de la manière dont la formation Alim’Activ leur a permis de structurer une démarche de coordination autour de la précarité alimentaire, grâce à des outils méthodologiques concrets. Les participants ont expliqué comment la formation les avait aidés à mieux cartographier les acteurs locaux, relancer des réseaux existants, monter des diagnostics alimentaires et lancer des projets (épiceries solidaires, paniers de fruits et légumes, lutte contre le gaspillage). Un point central de la discussion a porté sur la participation des habitants et des bénéficiaires, considérée comme indispensable mais encore difficile à mettre en œuvre, faute de temps, de ressources ou de pratiques installées. Enfin, la table ronde a souligné que la formation apporte non seulement des méthodes, mais aussi un espace d’échanges entre pairs, essentiel pour sortir de l’urgence quotidienne et construire des actions plus durables et collectives.
La journée s'est achevée autour de plusieurs ateliers. La Chaire a eu l'occasion d'assister à un atelier de grande qualité sur la participation des personnes en situation de précarité alimentaire avec comme intervenantes des représentantes du Secours Catholique et du CNA. Nous n'en dirons pas plus car cela nous a inspiré une autre publication, à même de remplir notre mission d'interconnaissance au sein du réseau AUPA. A suivre donc !

Pour aller plus loin :
Sachez que la journée se voulait être le bilan d'une série de MOOC sur les précarités alimentaires de façon globale et en Île-de-France : Voici donc quelques liens utiles :
Genially des webinaires de lutte contre la précarité en Ile-de-France : https://view.genially.com/670e6fd8d68a2347ae66e933
MOOC Les précarités alimentaires https://www.fun-mooc.fr/fr/cours/les-precarites-alimentaires/
Les webinaires précarités alimentaires en Ile-de-France : https://www.solidarites-actives.com/fr/nos-projets/les-webinaires-les-precarites-alimentaires-en-ile-de-france
