Retour sur la restitution de Passerelle Plus par ACF
- clotildesaurine
- il y a 23 heures
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Dernière mise à jour : il y a 2 heures
Lundi 15 décembre se tenait au Théâtre public de Montreuil une après-midi dédiée au projet Passerelle Plus en présence du maire de la Ville Patrice Bessac) des partenaires associatifs (Action contre la Faim, Fondation de l’Armée du Salut), de recherche (INRAE) pour présenter les résultats d’une expérimentation visant à améliorer l’accès à une alimentation saine, durable et accessible, en partant de principes clés : la confiance et la liberté de choix. Au titre du réseau AUPA, la Chaire a pu y assister, l'occasion de présenter ce dispositif qui teste une aide peu courante en France, le transfert monétaire non fléché avec un accompagnement social qui a marqué les participant.e.s à cette expérimentation.

Qu'est-ce que Passerelle Plus ?
Le dispositif présenté combine :
Une aide financière non fléchée : 60 € par personne du foyer et par mois pendant 4 mois, sur une carte de paiement.
Un accompagnement social individuel sous forme d'entretiens avec une des deux travailleuses sociales qui ont permis de faire le point sur les recours aux droits
Un atelier collectif autour de l’alimentation
Un dispositif à destination de publics souvent non visibles
Ce sont des personnes en situation de précarité ayant peu ou pas recours aux dispositifs d'aide classique (suivi social, recours à l’aide alimentaire) qui ont été repérés par 21 structures de proximité (centres sociaux, associations, etc.), sans exiger de justificatifs en prenant en compte une approche large de la précarité.
Les profils des personnes sont une majorité de femmes (82%), beaucoup de familles avec enfants (dont une part importante de familles monoparentales), des situations de travail et de santé très variées, mais globalement sous le seuil de pauvreté, avec une insécurité alimentaire très élevée au départ (82%).
Évaluation de l'impact par l'INRAE
Présenté par Marlène Pérignon, la recherche a utilisé une méthode comparative avec répartition aléatoire en deux groupes : un groupe bénéficiait tout de suite, l’autre plus tard, avec des questionnaires au début, à 3 mois et à 6 mois. Cela permet d’attribuer plus sûrement les changements observés au dispositif.
Quels résultats clés ?
À 3 mois : le dispositif réduit nettement la précarité/insécurité alimentaire, avec notamment deux fois moins de risque d’insécurité alimentaire sévère dans le groupe aidé. L’insécurité alimentaire passe de 81% à 51% en trois mois chez les ménages soutenus.
Les ménages déclarent majoritairement utiliser l’aide pour l’alimentation : 89% disent l’avoir utilisée pour des dépenses alimentaires (souvent pour acheter plus, et parfois mieux). Sur les achats, la hausse mesurée des dépenses en fruits et légumes est d'environ 5 euros/mois / personne et l'on note une petite amélioration de la diversité alimentaire (+0,5 points).
À 6 mois cependant (donc environ 2 mois après la fin des versements), l’écart fort observé à 3 mois n’est plus aussi visible : l’effet est jugé fort mais transitoire, ce qui relance la question de solutions plus durables et de politiques de plus grande ampleur.
Le dispositif a également permis une amélioration des effets sur le bien-être et le lien social. Les témoignages ont insisté sur le soulagement (financier et mental), la possibilité de “respirer”, de mieux dormir, de reprendre prise sur son quotidien, et parfois de recréer des moments familiaux telles que des sorties, anniversaires, vacances. Ce sont là des témoignages poignants qui permettent de réaliser à quel point la question de la précarité engendre des privations qui vont bien au-delà de la nutrition seule.
Les forces du dispositif
La restitution de l'étude en présence de participant.e.s a mis en avant des mécanismes de réussite telle que la liberté d'usage et le fait de faire confiance aux participant.e.s.. Ils ont eu une carte de paiement “comme les autres”, non stigmatisante avec un versement en milieu de mois, au moment où le budget est souvent déjà absorbé par loyer/factures. Ces cartes ont permis des retraits d’espèces (en moyenne 46% du montant retiré), notamment pour le marché ou les commerces sans paiement carte, et pour mieux piloter son budget.
L'accompagnement social via des entretiens ouverts (400 entretiens menés) a largement été plébiscité permettant d'aborder la situation des participant.e.s et de soulever des questions de non recours aux droits par méconnaissance des dispositifs en place (sur le logement et la santé notamment). Mais c'est surtout une réelle écoute qui a largement fait la différence.
Quelles suites ?
Après l’expérimentation, il a été rappelé la prudence qu'il faut avoir sur l’idée d’une “sortie de précarité” en 4 mois, mais des déblocages et des réorientations vers des droits et ressources existent. Les effets du dispositif diminuent une fois l’aide stoppée, d’où l’appel final à des politiques plus universelles et durables.




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